Fin du monde : Les signes annonciateurs révélés par le Coran.

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Selon Anas, un compagnon direct du Prophète, celui-ci aurait dit : « Parmi les signes avant-coureurs de l’Heure suprême, on verra la science disparaître, et l’ignorance s’accroître, l’adultère sera très fréquent, on boira beaucoup de vin, les hommes diminueront de nombre tandis que les femmes deviendront si nombreuses qu’il n’y aura plus qu’un seul homme pour soutenir cinquante femmes. »

Pour comprendre l’avènement de la fin du monde dans l’islam, il faut revenir à la naissance du Coran. Au VIIe siècle, la révélation du livre sacré ne pouvait être comprise par les adeptes de Muhammad que comme la négation du monde « fini » qu’ils connaissaient et la promesse d’un monde nouveau qu’ils allaient apprendre à connaître.

Dieu ne pouvant en effet s’exprimer dans la terminologie commune de la tribu, il lui fallait le truchement d’une langue symbolique originale. De fait, pour que le châtiment divin ait du sens, il devait s’inscrire dans le cadre d’une manifestation de la vérité divine qui soit intelligible, bien qu’opposée aux préconisations du paganisme bédouin.

L’enfer fait l’objet des descriptions les plus épouvantables

Cet imaginaire de l’après-monde est lui-même structuré par des idées messianiques très fortes : « purgatoire » (qui n’est pas cité dans le Coran, mais dont on comprend qu’il existe), Jugement dernier, balance eschatologique et chemin rectiligne, lequel conduit les élus vers le paradis, mais qui laisse tomber les réprouvés dans la géhenne. Enfin, le verdict final. Alors que les Bédouins croyaient aux grands cycles fondateurs de la nature vénéraient le soleil et le vent se prosternaient devant les bétyles et les mégalithes, craignaient les eaux stagnantes et redoutaient les magiciens, le Coran leur enseigne des vérités situées au-delà du palpable, abstraites et intangibles. Il préconise surtout l’existence de mondes superposés que l’on peut atteindre par une ascèse fondée sur la restriction et la récompense, et non par les seules voies de la raison raisonnante.

La fin du monde prend tout son sens dans cette hiérarchie du visible et de l’invisible et finalement dans le cadre d’une prophétie où ce qui va advenir est toujours repoussé aux confins du monde actuel. La crainte de la fin contraint et restreint les épanchements humains d’ici et de maintenant. Quelques images effrayantes ajoutent à la crainte collective des premiers adeptes : le paradis est certes présent, mais c’est l’enfer qui fait l’objet des descriptions les plus épouvantables. Il est le lieu de l’arbre maudit, appelé zaqqoum, auquel mangeront les affamés, il est le hûtama (le « feu dévoreur d’entrailles »), il est le chaudron bouillant avec ses hautes flammes dans lequel l’âme des damnés sera balancée du haut d’un talus. Toutes les conditions psychologiques de la fin du monde sont réunies dans quelques versets. La peur viscérale, atroce, excessive, en est le moteur. La voie même qui y conduit est moins exigeante que celle qui mène au paradis. Dès ce moment-là, et avant même que les prophètes de mauvais augure ne surchargent la compréhension de l’au-delà par leurs simulacres, les croyants musulmans, crédules et sincères, ont commencé à scruter attentivement les signes annonciateurs de l’avènement apocalyptique : la fin du monde. Le Coran prête le flanc à toutes ces spéculations et transpose oralement et par écrit les raisons qui justifient a priori l’appréhension de l’enfer.

La sourate Al-Koussouf, en particulier, que l’on traduit par « L’Obscurcissement », relate les conditions de ceux qui sont pris dans des rets : « Lorsque le soleil se sera éclipsé. Lorsque les étoiles seront tombées ternies. Lorsque les montagnes se seront mises en mouvement. Lorsque les chamelles déjà pleines auront été retardées dans leur mise bas. Lorsque les bêtes sauvages se seront rassemblées. Lorsque les mers auront suffisamment bouillonné. Lorsque les âmes se seront regroupées. Et que l’on demandera à la fillette enterrée vivante pour quel mal elle a subi ce sort. Et que les feuilles du registre auront été déroulées. Et que le ciel aura été zébré d’éclairs. Et que la Fournaise aura été attisée. Et que le Paradis aura été à proximité. Chaque âme saura alors ce qui l’attend. »

Toutes ces manifestations anticipent l’extinction du monde et la résurrection des âmes. Elles sont prises à la lettre, et il suffit qu’un séisme plus fort que les autres se déclare, un feu abrasif, une catastrophe quelconque, ou que naisse une monstruosité biologique pour que les passions s’enflamment, et chacun de se rappeler les affres inquiétantes de l’immensité infernale. Dans d’autres sourates, nombre de précisions sont fournies et agissent de manière répétitive, quasi hallucinatoire. Le fait même qu’elles soient généralisables à l’ensemble des humains et non pas réservées aux seuls musulmans leur octroie une force prodigieuse.

Un ciel couvert d’une obscurité peu ordinaire

Ainsi, lorsque la femme perd ses enfants avant terme ou que les gens deviennent ivres sans qu’ils aient bu une goutte d’alcool (sourate XXII, verset 2), cela accrédite l’idée que le cataclysme est planétaire, et non pas seulement local. Dans une autre sourate, il est aussi question d’un ciel couvert d’une obscurité peu ordinaire, une « nuit éternelle ». Enfin, d’autres phénomènes contrariant le sens commun interviennent à un moment où rien ne les laissait prévoir : les morts sortiront de leurs tombes, l’Arabie, qui subira une immense secousse, sera sens dessus dessous, l’Orient et l’Occident disparaîtront, au moment où Gog et Magog, des êtres à l’aspect hideux, apparaîtront et domineront le néant.

Ces deux entités de l’inframonde font d’autant plus peur qu’aucun texte n’a réussi à ce jour à les décrire. Ils inquiètent par la seule magie de leur nom. D’aucuns les décrivent comme des êtres tronqués, des moignons. La terre en particulier est observée de manière scrupuleuse, car les signes telluriques ont sur l’être humain un impact cataclysmique plus spectaculaire. D’abord, une première alerte est formulée en ouverture de la sourate XXII, « Le Pèlerinage », avec ces mots : « Ô vous les hommes, craignez votre Seigneur, car le jour où le séisme de l’Heure [finale] se produira, ce sera quelque chose d’immense. Lorsque vous verrez ce séisme, vous verrez fuir la femme allaitant son enfant et toute femelle enceinte déposera son faix sans l’avoir voulu ; tu verras des gens ivres alors qu’ils n’auront pas bu. De fait le châtiment d’Allah sera terrible. » Le Coran est aussi explicite dans une autre sourate « Le Tremblement de terre », aux quatre premiers versets : « Lorsque la terre sera secouée d’un séisme destructeur, et que la terre rejette tout son surpoids, et que l’homme se demandera ce qui lui arrive : ce jour-là, elle dira ce qu’elle sait. » Quant au Prophète, il aurait dit : « La fin du monde sera d’actualité le jour où le soleil se lèvera à l’endroit où il se couche. » Dès qu’ils verront ce phénomène, les hommes se prosterneront et comprendront que la fin des temps est proche. Pourtant, au-delà de ces indices à forte connotation symbolique – car ils sont réversibles -, une tradition ultérieure, que l’on ne peut dater avec précision, a tenté de développer le thème en l’élargissant aux confins de l’imagination humaine.

Pas moins de treize occurrences liées à la fin du monde

On se mit à évoquer l’Antéchrist (le Dajjal), la Bête apocalyptique (Jassassa), la résurrection du Christ, qui est selon le Coran l’un des signes définitifs de la fin des temps. Dans la sourate LXXVII, « Les Envoyés », aux versets 7 à 10, on peut lire que l’apocalypse se réalisera selon les plans divins expliqués dans le Coran : « Ce qui vous a été promis sera tenu, lorsque les étoiles s’éclipseront, et que le ciel se sera fendu, et que les montagnes se seront émiettées. »

Une apocalypse est possible selon l’islam. Elle aura lieu tout juste avant la disparition de notre univers. On ne dénombre pas moins de treize occurrences explicitement consacrées à la fin du monde (ahwal al-akhira) et au déploiement eschatologique de la volonté d’Allah de mettre fin à sa Création : « Lorsqu’il sera soufflé dans la trompette du jugement un appel immense et unique. Et que la terre et les montagnes seront entraînées et pulvérisées de manière spectaculaire, ce Jour-là se produira l’inéluctable. Le ciel se fendra et tombera en lambeaux. » (Sourate LXIX, « Celle qui doit venir », versets 13-16). Mais en aucun cas cela n’est daté, et rien n’indique que le calendrier divin soit calqué sur le calendrier humain, le temps divin étant par essence infini. Un fait certain, c’est que Dieu s’exprime amplement dans le Coran selon des modalités de ce temps incommensurable, mais il est impossible de convertir ce temps en durée physique, encore moins en un temps historiquement daté.

Pas de Nostradamus dans la religion musulmane, mais des devins (kûhhan) en grand nombre, et une astrologie populaire qui a fait florès. De fait, la création de ce champ arborescent donne lieu à d’innombrables spéculations, qui vont de quelques mots farfelus et sans paternité à des centaines de théories péremptoires. Comme le public est crédule et anxieux par nature, la nécessité de le préparer à l’avènement de la fin des temps occupe ainsi un très grand nombre de « médecins autoproclamés de l’âme », souvent des marabouts, des imams et des prédicateurs. Leur technique est rodée, les signes sont classés selon leur importance : les lointains, les proches et les imminents. La référence est toujours la même : on remonte aux premiers théologiens de l’islam et aux commentateurs du Coran, qui présentent l’avantage de ne pas être là pour rétorquer ou pour corriger. Leurs prophéties sont parfois extravagantes, et tiennent essentiellement aux moeurs, à leur corruption, et à l’importation de valeurs extérieures à la doctrine en vigueur. L’homosexualité, qui deviendra dominante, la généralisation de l’adultère, l’indécence des femmes…

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